mercredi 9 mars 2011

Transits solaire et lunaire de l'ISS !

J'ai acquis en 2010 le fameux tube optique Triplet Carbone ASTRO-Professional 80/480. Un choix guidé par la volonté de posséder un instrument ultra polyvalent et très facile à emmener avec moi, grâce à ses poids et encombrement réduits. Cette lunette me permet en effet d'observer les astres, la nature (les oiseaux notamment), de photographier les planètes, le ciel profond, et des sujets animaliers (utilisation comme téléobjectif).
J'avais aussi opté pour cette lunette car je souhaitais réaliser des images des transits de la Station Spatiale Internationale devant le Soleil et la Lune. Ces derniers mois, les conditions météo ont remis à plus tard mes tentatives... Jusqu'à hier où j'ai pu réaliser un coup double avec le passage de l'ISS non loin d'un beau groupe de taches solaires dans l'après midi, et hier soir où la station croisait cette fois la trajectoire d'un beau croissant lunaire...


Préparation du matériel : ce genre d'exercice est facilité lorsque l'amateur dispose d'outils pratiques. J'ai ainsi sélectionné un filtre solaire photo (densité 4), un GPS pour connaître avec exactitude l'heure légale (installé sous le boîtier photo), un boîtier photo Canon EOS 550D, un doubleur Canon + bague allonge Kenko + adaptateur photo + tube allonge, une raquette de commande intervallomètre, des petits outils, piles de rechange, couteau suisse, lampe frontale (pour la prise de vue du soir)... Tout cela logé dans une mallette aux dimensions restreintes (51 x 31 x 21 cm).


Installation du matériel : je souhaitais effectuer des prises de vues ainsi qu'observer en direct le passage de l'ISS devant le Soleil. J'ai donc installé sur ma monture (une Vixen SP/DX) une platine multi-usage sur laquelle j'ai fixé d'un côté la Carbone ASTRO-Professional et de l'autre un PST Coronado (cette lunette permet d'observer le Soleil dans la raie H-Alpha, donc de voir la chromosphère avec son lot de protubérances spectaculaires). Le site d'observation des transits a été trouvé grâce au site Internet Calsky (inscription gratuite).


Montage du matériel : sur l'image ci-dessus, vous pouvez voir quel montage j'ai utilisé. Au foyer de la lunette, j'ai d'abord inséré un tube allonge ASTRO-Professional de 40 mm de longueur, qui permet d'obtenir la mise au point à l'infini sans devoir trop jouer sur le tirage du porte-oculaire. J'ai ensuite installé un adaptateur photo coulant 50,8 mm, le doubleur Canon, ainsi qu'une bague macro Kenko débarrassée de ses contacts électriques (ces contacts empêchent normalement le boîtier de déclencher lorsqu'un doubleur est monté dessus). En sortie de montage, le Canon EOS 550D a été choisi pour sa haute définition (18 mpix). L'EOS est piloté par une commande intervallomètre C1 qui a l'immense mérite de permettre de programmer le lancement des prises de vues (le photographe peut alors profiter tranquillement de l'observation sans stresser à l'approche de l'événement).

Place aux images : l'installation du doubleur Canon et le coefficient induit par la taille du capteur APS-C du 550D engendrent une focale résultante proche de 1 600 mm. L'exceptionnelle qualité optique de la lunette fait ensuite le reste... Le piqué est élevé (compte tenu du sujet photographié, toujours sujet à turbulences) et l'absence de chromatisme assure des zones de transitions absolument impeccables entre les taches solaires et le reste de la photosphère, ou encore entre le limbe solaire et le ciel !

Ci-dessous, l'une des trois images prises du transit (la cadence du moteur du 550D est de 3,7 i/s, le transit ayant duré 1,03s), est aussi la plus nette. Etant donné la vitesse de déplacement de l'ISS (29 000 km/h), le temps de pose utilisé était de 1/4000è s (pour 100 iso) afin d'obtenir une image la plus figée possible. Cette image est d'autant plus intéressante et rare qu'un beau groupe de taches solaires s'était invité.


Le crop 100%, recentré sur l'ISS et sur le groupe de taches, montre la bonne résolution finale (l'ISS est alors à 611 km de distance). Aucun traitement sophistiqué n'a été appliqué à cette image.


Ce transit avait lieu à 14h30, le mardi 8 mars. Dès le soir même, vers 19h15, l'ISS passait cette fois devant un croissant de lune. J'ai utilisé la même configuration pour les montages et l'instrument utilisés, hormis bien sûr en ce qui concerne le filtre solaire à l'ouverture. Cette fois, la difficulté était bien plus grande en raison de la faible luminosité de la Lune par rapport au Soleil : le temps de pose passait ainsi de 1/4000è s (pour 100 iso) à 1/180è s (pour 1600 iso). D'où des images nettement plus granuleuses, même si elles demeurent de qualité convenable.

Ci-dessous, l'ISS se situe proche du centre du disque lunaire, dans sa partie non éclairée. On voit assez bien ses principaux panneaux solaires.


Continuer dans cette voie...
La route est souvent longue avant de trouver l'instrument et les accessoires parfaits. Avec la lunette Triplet Carbone ASTRO-Professional 80/480 je pense n'avoir jamais été aussi proche de la satisfaction. J'attendais avec impatience son comportement sur des sujets photographiques de ce type... Les résultants obtenus sont très bons, exactement comme je les espérais. Et le rangement du matériel, dans la petite mallette, ne prend que quelques minutes. Bref, si vous le pouvez, n'hésitez pas : craquez vite pour ce tube optique hors normes !

Christophe Lehénaff

Nouvelles images (ajoutées à cet article le 23 mai 2011).
Les images obtenues avec cette lunette ont, depuis cet article, été grandement améliorées, grâce notamment à l'emploi d'un ensemble extendeur x1,4 et doubleur Canon empilés. Cette association permet d'agrandir encore plus l'image afin de remplir au maximum le champ couvert par le format APS-C du Canon EOS 550D. Le 21 mai dernier, j'ai assisté à un passage particulièrement spectaculaire où ISS et navette spatiale transitèrent durant seulement 0,5s (diamètre apparent de l'ensemble : environ 70" d'arc). Ci-dessous, images en plan large et crop 100%.