La pollution lumineuse est devenue le problème n° 1 rencontré par la plupart des astronomes amateurs occidentaux ! A ceci une raison fort simple : les villes se développent de plus en plus, de même que les éclairages urbains, souvent mal adaptés. Autre raison, psychologique et subjective : éclairer est souvent synonyme pour le citoyen (mal informé) de sécurité, alors que les études réalisées ne montrent aucune corrélation entre éclairage et sécurité, bien au contraire.
Pour l'astronome amateur, deux solutions sont possibles pour accéder à un meilleur ciel : se déplacer ou utiliser des filtres de rejet de pollution lumineuse !
Migrer vers d'autres cieux... Tout le monde ne peut pas le faire, d'autant qu'en France métropolitaine le temps n'est guère stable et il est difficile de programmer un déplacement de plusieurs dizaines de km ou plus avec la certitude que le beau temps sera au rendez-vous ! Certaines régions demeurent très convenables sur le plan de la qualité du ciel : citons par exemple le centre de la France ainsi que quelques zones de Haute-Provence particulièrement sombres. Bien entendu, il n'est pas forcément obligatoire d'aller loin pour profiter d'un bon ciel...
La campagne est souvent propice à réaliser de belles observations. En région parisienne par exemple, la Seine et Marne réserve de très bonnes surprises pour peu que l'on mette une cinquantaine de km entre le site d'observation choisi et la capitale. En fait, vous l'aurez compris, il suffit de s'éloigner le plus possible des lumières des villes pour retrouver une qualité de ciel digne de ce nom. Si tel est le cas, à vous les objets célestes les plus faibles, tels que nébuleuses et galaxies.
Ci-dessous : une image de la Voie lactée prise en Seine et Marne, à 50 km de Paris. Même à une distance aussi proche d'une si grande ville, il est possible d'observer la Voie lactée. Notez aussi que le bas de l'image est plus clair que le haut : prise au grand angle, cette image montre que la pollution lumineuse est plus sensible vers les horizons que vers le zénith.
Utiliser des filtres de rejet de pollution lumineuse... Même si ce précieux accessoire n'est pas la panacée, force est de reconnaître qu'il permet d'améliorer sensiblement la noirceur du ciel, donc le contraste des objets pointés. Certains de ces filtres peuvent d'ailleurs aussi être utilisés depuis un bon site, car leur efficacité est pour l'essentiel ciblée sur un type d'objet particulier. Explications...
Les filtres de rejet de pollution classiques : ce sont les LPR, Deep Sky, Broadband, UHC-S, etc. Leur bande passante (le filtrage que reçoit leur optique) est assez large, centrée sur les raies des H-Alpha, H-Bêta et Oxygène, mais en interdisant le passage des lumières centrées sur le sodium et le mercure (éclairages publics). Pour l'amateur, leur recours se traduit par un assombrissement net du fond de ciel et par une augmentation du contraste de l'objet, variable en fonction de ses caractéristiques : une galaxie sera peu renforcée, au contraire d'une nébuleuse à émission.
Ci-dessous : le filtre Baader UHC-S. Son appellation est un peu trompeuse mais il s'agit bel et bien d'un filtre appartenant à la famille des filtres de rejet de pollution lumineuse classiques. Il permet donc de noircir le fond de ciel et s'avère efficace sur un grand nombre d'objets, galactiques ou nébuleux. Cliquez sur l'image pour accéder aux fiches techniques des filtres.
Les filtres à bande passante plus étroite : ce sont les Narrowband, UHC, etc. Leur bande passante est plus étroite et centrée sur la raie de l'oxygène. Ces filtres sont nettement plus efficaces que les précédents mais ne fonctionnent pas avec les objets galactiques. En revanche, ils permettent de renforcer de manière sensible le contraste de la plupart des nébuleuses.
Ci-dessous : la nébuleuse d'Orion observée sans et avec un filtre LPR. Sur l'image de gauche, la nébuleuse apparait faiblement contrastée et le fond de ciel assez clair. Au contraire de l'image de droite vue à travers un filtre spécifique.
Les filtres Oxygène : ce sont les filtres OIII. Leur bande passante est centrée uniquement sur l'oxygène, c'est-à-dire sur la lumière reflétée par les nébuleuses planétaires. Leur efficacité est souvent assez spectaculaire, mais leur bande passante restreinte oblige à utiliser une lunette ou un télescope de bon diamètre (souvent 150 mm au minimum).
Ci-dessous : plusieurs filtres pour ciel profond... Au coulant de 31,75 mm (le plus petit des trois), au coulant de 50,8 mm (le moyen), - ils se vissent donc sur la douille des oculaires - et à visser au foyer d'un télescope Schmidt-Cassegrain (le plus grand).
Les autres filtres : ce sont les H-Bêta, et les Swanband. Les premiers ne sont dédiés qu'aux nébuleuses obscures, c'est-à-dire les nébuleuses vues en 'contre jour' (des étoiles brillantes en arrière plan mettent en évidence leur forme par effet de contraste). L'exemple typique est celui de la nébuleuse de la Tête de cheval. Leur bande passante étant très étroite, un instrument d'au moins 200 mm est préférable pour les utiliser. Les seconds, les Swanband, mettent en évidence les comètes (leur noyau notamment).
Christophe Lehénaff